lundi 19 septembre 2016

Le jeu de l'ange de Carlos Ruiz Zafon

Barcelone, années 1920. David Martin, dix-sept ans, travaille au journal La Voz de la Industria. Son existence bascule un soir de crise au journal : il faut trouver de toute urgence un remplaçant au feuilletoniste dominical. Sur les conseils de Pedro Vidal, chroniqueur à ses heures, David est choisi. Son feuilleton rencontre un immense succès et, pour la première fois, David est payé pour ce qu'il aime le plus au monde : écrire.
En plein succès, David accepte l'offre de deux éditeurs peu scrupuleux : produire à un rythme effréné des feuilletons sous pseudonyme. Mais après quelques années, à bout de force, David va renoncer. Ses éditeurs lui accordent alors neuf mois pour écrire son propre roman. Celui-ci, boudé par la critique et sabordé par les éditeurs, est un échec. Son ami libraire, Sempere, choisit ce moment pour l'emmener au Cimetière des livres oubliés, où David dépose le sien. Puis arrive une offre extraordinaire : un éditeur parisien, Corelli, lui propose, moyennant cent mille francs, une fortune, de créer une texte fondateur, sorte de nouvelle Bible, « une histoire pour laquelle les hommes seraient capables de vivre et de mourir, de tuer et d'être tués, d'offrir leur âme ».


Une fois de plus, c'est un plaisir de retrouver la plume et l'univers de Carlos Ruiz Zafon. Le Jeu de l'ange fait partie de la saga du cimetière des livres oubliés. L'histoire se déroule des années avant L'ombre du vent, lorsque le père de Daniel Sempere est encore un jeune homme. On y retrouve également ce fameux cimetière des livres oubliés et cette ambiance si particulière et si sombre de Barcelone, car l'histoire se déroule lors de la dictature militaire de Miguel Primo de Rivera.

Les personnages sont tous excellemment bien fouillés. Certains sont très sombres comme le personnage principal David Martin ou son maître Pedro Vidal. Ce dernier n'a pas lié d'amitié de façon désintéressée car il se sent coupable d'un évènement passé. D'autres sont une bouffée d'air frais et de soleil comme Isabella qui a du caractère et est très drôle, ou encore Sempere senior.  Il y a aussi beaucoup de mystère autour du "Patron" dont on ne comprend pas le but de cet étrange livre que David doit écrire.

"Un écrivain n'oublie jamais le moment où, pour la première fois, il a accepté un peu d'argent ou quelques éloges en échange d'une histoire. Il n'oublie jamais la première fois où il a senti dans ses veines le doux poison de la vanité et cru que si personne ne découvrait son absence de talent son rêve de littérature pourrait lui procurer un toit sur la tête, un vrai repas chaque soir et ce qu'il désirait le plus au monde: son nom imprimé sur un misérable bout de papier qui, il en est sûr, vivra plus longtemps que lui. Un écrivain est condamné à se souvenir de ce moment, parce que, dès lors, il est perdu: son âme a un prix."

Une fois de plus, ce livre est une ode à l'écriture. Dans l'ombre du vent on suit un personnage qui s'attache au livre de Julian Carax et cherche à en connaître les mystères. Dans celui-là, c'est par le biais d'un écrivain que l'on suit cet amour de l'écriture. On y découvre ses envies mais aussi ses obligations, ses possibilités, le travail de nègre, la critique, etc.

J'aime toujours autant l'écriture de l'auteur qui sait mettre en lumière Barcelone au point de lui donner un charme mystérieux et irrésistible.  Tout comme les précédents livres que j'ai pu lire de Carlos Ruiz Zafon, l'histoire des personnages, bien que triste et sombre la plupart du temps, apporte une touche de poésie et de lumière à cet univers brumeux. De plus, il a le pouvoir de nous faire voyager dans les rues de la ville en un rien de temps.

"L'envie est la religion des médiocres. Elles les réconforte, répond aux inquiétudes qui les rongent de l'intérieur et, en dernière instance, leur pourrit l'âme et leur permet de justifier leur mesquinerie et leur jalousie au point de croire que ce sont des vertus et que les portes du ciel s'ouvriront seulement pour les malheureux comme eux, qui passent dans la vie sans laisser plus de traces que leurs sordides tentatives de rabaisser les autres et si possible de détruire ceux qui, par le simple fait d'exister et d'être ce qu'ils sont, mettent en évidence leur pauvreté d'esprit, d'intelligence et de courage. Bien heureux celui que lapident les crétins, car son âme ne leur appartiendra jamais."

 Dans ce second tome, le fantastique est bien plus présent que dans le premier tome. Comme à son habitude, Carlos Ruiz Zafon sait parfaitement mélanger les genres et c'est en partie ce qui fait le charme du récit à mes yeux.

 Après Marina et l'ombre du vent, je peux affirmer que la trame fonctionne de la même manière dans ce livre-là. Du coup l'effet de surprise n'est plus présent, même si j'ai tout de même adoré le livre. Il y a quand même un petit point négatif à souligner: David arrive parfaitement à se débarrasser de ses agresseurs. Je trouve ça un peu gros et ça m'a donné l'impression de bâcler certains passages pour en revenir à l'histoire principal.

"Il est vrai qu'aux stades les plus avancés du crétinisme l'absence d'idées est composée par l'excès d'idéologies."

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